Samedi de Lasalle

Permettez-moi de vous présenter rapidement notre association, de vous exprimer en quoi nous nous sentions proches de la famille lasallienne et, plus particulièrement, du service éducatif aux pauvres. Je vais ensuite témoigner des difficultés et mais aussi des joies que nous rencontrons dans le cadre de notre mission.

En 1978, quelques Frères des Ecoles Chrétiennes, fidèles à leurs objectifs d’aide aux plus démunis fondèrent le Centre Mutien-Marie à Philippeville, qui se composait d’un Institut Médico-Pédagogique (IMP) et d’une Ecole Secondaire Spéciale pour enfants handicapés.

Bien vite, cette nouvelle association bienfaitrice allait connaître un franc succès. Après un an ou deux, l’école comptait 120 élèves et l’Institut Médico-Pédagogique avait rempli facilement ses 60 places.

En 1983, suite à de nouvelles lois, l’A.S.B.L. se scinda en deux et se sépara de l’école qui allait connaître une vie autonome sous le nom de : « Institut Notre-Dame », seule école d’enseignement secondaire spéciale du district. Dorénavant, l’A.S.B.L. Centre Mutien-Marie pouvait concentrer ses forces pour se consacrer et se spécialiser dans l’aide psycho-médico-sociale auprès des enfants suivant une scolarité spéciale.

Assez rapidement, les responsables se rendirent compte que certains enfants étaient tellement handicapés ou tellement perturbés qu’ils ne pouvaient pas suivre régulièrement les cours, même d’un enseignement spécialisé. Il fut décidé de créer le Centre Occupationnel pour enfants non-scolarisés. Cette année-là, une section s’ouvrait donc à Nismes dans les bâtiments de l’actuel « ESPOIR ET FRATERNITE ». Après quelques années, la section se rapprocha de Philippeville, pour venir s’installer dans la petite fermette de Jamagne où elle prend le nom de « POULY » ce qui veut dire « Poulailler » en wallon.

En 1986, voyant que sa population vieillissait et que rien n’était organisé dans la région pour les handicapés adultes, le Centre Mutien-Marie crée un premier centre de jour à Yves-Gomezée « LA ROSERAIE » en vue d’accueillir une quinzaine de handicapés adultes non-travailleurs. Vu l’immense succès de ce premier centre, un autre fut créé en 1987 sur le territoire d’Anthée-Onhaye.

Ce nouveau centre est appelé « LE TOURNEVENT » et peut accueillir dix-huit handicapés adultes. Enfin, vu l’énorme demande, le centre de Jamagne (le Pouly) fut lui aussi transformé en centre pour adultes non-travailleurs au 1er janvier 1989. Continuant sur sa lancée, le Centre Mutien-Marie crée enfin un quatrième centre dans la région de Ciney nommé « LE GATY » en janvier 92. En 1994, 97 et 98 nous obtenons des augmentations de capacité, pouvant accueillir ainsi 77 personnes handicapées au total des 4 centres. Au 1/1/98 les Centres de jour prennent une nouvelle dénomination : « les Services d’accueil de jour pour adultes » et nous pouvons accueillir 85 personnes. Etre des services d’accueil de jour est une richesse importante dans la mesure où les personnes les plus démunies qui nous sont confiées gardent le contact avec leur famille et la collaboration entre institution et celle-ci permet d’atteindre des résultats très encourageants. Néanmoins, les familles vieillissent en même temps que leurs enfants. Et très régulièrement, nous avons des demandes de parents inquiets et responsables : ils seront bientôt trop âgés que pour pouvoir encore s’occuper de leurs enfants eux-mêmes… Ou pire l’âge avançant, ils envisagent lucidement leur disparition et se posent la question de l’avenir de leur progéniture.

En effet, leur inquiétude est très réaliste. Quand les parents ne peuvent plus assurer l’accueil de leur enfant en soirée et le week-end, un réel problème se pose : où va-t-il aller ? Parfois un membre de la famille accepte de les accueillir mais souvent les portes se ferment. Nous avons déjà dû nous séparer de personnes que nous avions accompagnées depuis des années, que nous avions appris à aimer, à aider, qui avaient bien évolué chez nous et qui y étaient heureuses. Mais voilà, nous n’avions pas de structure d’hébergement propre, tous les centres existants sont saturés et la Région Wallonne coincée dans ses impératifs budgétaires ne crée plus aucun lit depuis des années. Dans des drames humains difficilement supportables, nous avons réorienté ces personnes vers d’autres solutions inappropriées : hôpitaux psychiatriques, home du troisième âge, … En les arrachant aux derniers repères qu’elles avaient, après le décès de leur famille qu’elles n’avaient jamais quittée.

Très conscient de ce problème lancinant, le CENTRE MUTIEN-MARIE avait l’intention de créer son propre service résidentiel de nuit. La demande des parents était pressante et les besoins criants. La création d’un service d’accueil de nuit se rappelait toujours à notre conscience. Une occasion unique, providentielle s’est présentée à nous. Un hôtel de luxe avec 10 chambres équipées de douche, évier, toilettes, 20 places de nuit, placé idéalement au centre de nos quatre maisons était à vendre. Nous qui voulons toujours le meilleur pour les personnes que nous accueillons, nous ne pouvions rêver mieux. Avec l’aide des frères, en janvier 2001, nous ouvrions notre centre de nuit non-subsidié : « La Chevalerie » à Rosée, en moins d’un an les places furent remplies et aujourd’hui une liste d’attente est déjà constituée. Nous envisageons peut-être déjà la mise en place d’un second centre de nuit dans la région de Dinant.

Le frère visiteur m’a demandé de témoigner et d’exposer en quoi le CENTRE MUTIEN-MARIE se rattachait à la famille lasallienne. Cela implique que l’on définisse ce qu’est un projet lasallien, une institution lasallienne. Je me suis donc demandé ce qui distinguait ce type d’institutions d’autres œuvres de bienfaisance. Je ne suis pas un théologien, ni un spécialiste de la pensée de Saint Jean-Baptiste mais je me suis prêté à cet exercice périlleux et ai essayé de trouver quelques repères qui permettent de se situer. Je pense que l’on peut sérier deux types de critères : des critères institutionnels et d’autres liés à la mission.

En termes institutionnels, une entreprise qui voudrait se revendiquer de la famille lasallienne, doit avoir à mon avis, dans sa genèse, dans sa création, dans sa croissance, dans son développement, le souffle de représentants de l’Institut des Frères des Ecoles Chrétiennes : des frères eux-mêmes ou dans le cadre de la mission partagée des laïcs non-consacrés mais ayant reçus une formation à la pensée de St Jean-Baptiste. Par rapport à cette référence, le CENTRE MUTIEN-MARIE est tout à fait à l’aise. Il a été fondé en 1978 par les frères Félix DUBOIS et FRINGS auxquels est venu s’ajouter assez rapidement le frère Pierre EUL qui remplaça le Frère DUBOIS à la présidence en 1983. Le frère Eul est toujours président et mène sa mission avec beaucoup de finesse et de clairvoyance. Le directeur que j’ai remplacé est un frère : le frère Joseph Molitor a dirigé l’établissement de 1983 à 88 dans des circonstances très difficiles. Celui-ci est rentré depuis lors dans notre conseil d’administration. Enfin, dès que j’ai repris la direction de l’établissement, je me suis fait un devoir de suivre les formations dispensées par le centre lasallien ici à Ciney.

Je crois qu’il est important aussi que l’esprit de St Jean-Baptiste soit dans la quotidienneté de l’association par la présence de frères ou de témoins au sein même des équipes de travail. Ainsi dans le personnel nous avions encore il y a peu un frère qui a travaillé comme éducateur à temps plein durant 10 ans au sein d’une de nos sections : le frère Théo HILGERS et je pouvais, jusqu’il y a quelques mois, toujours compter parmi les bénévoles les plus dévoués et les plus actifs le frère Camille BORSU. Malheureusement, la maladie ou la mort nous ont séparés de bénévoles extraordinaires qui laissent une trace indélébile dans l’institution : le frère Albert DEBAST et le très regretté André DEWOUTERS. Le vieillissement objectif des frères pose un vrai problème de transmission du message et du témoignage. A deux reprises, l’ancien frère supérieur John JOHNSON est venu nous visiter et nous encourager dans notre travail. Voilà pour la référence institutionnelle, mais je pense qu’elle serait peu de chose sans l’esprit et la qualité du travail que nous voulons mettre en place. Quelle est donc la spécificité d’un projet Lasallien, en quoi nous distinguons-nous, d’ATD-Quart Monde, de St Vincent de Paul ou des Jésuites par exemple ?

Saint Jean-Baptiste de la Salle a été déclaré protecteur céleste de tous les éducateurs chrétiens en 1950 par le pape Pie XII. Je pense donc qu’un des premiers critères est donc bien de faire œuvre d’éducateurs et de plus d’éducateurs chrétiens : Saint Jean-Baptiste disait lui-même qu’une école des frères était d’abord une école chrétienne. Mais quelle est alors la distinction entre les différentes missions éducatives qui parcourent l’Eglise. Quelle est l’originalité du mouvement lasallien dans le cadre de ces missions ?

St Jean-Baptiste et les premiers frères ont voulu se consacrer aux enfants les plus pauvres, ceux dont personne ne voulait s’occuper, ceux qui ne comptaient pas dans cette société du 17°siècle. L’éducateur lasallien doit se destiner aux plus démunis, aux plus pauvres, aux plus simples. Les autres missions éducatives sont tout aussi importantes mais la singularité du projet lasallien est de s’intéresser aux plus démunis et de continuer à rechercher et à se recentrer sur les nouvelles pauvretés, les nouvelles indigences. Enfin je ne pense pas que le but de l’œuvre d’éducation est de donner un métier à la personne, mais bien de construire un Homme plus grand, plus épanoui, plus heureux dans la lumière du Christ. Le travail, comme réalisation de soi et comme moyen d’insertion sociale ne doit être qu’un moyen pour atteindre ces objectifs supérieurs.

Pour me résumer et de façon très synthétique, j’ai donc envie de définir la mission lasallienne comme une œuvre d’éducation aux plus démunis dans un but de croissance de l’Homme et dans la lumière du Christ. Il convient d’analyser maintenant si l’institution que je dirige correspond à ces critères.

Par un curieux glissement de sens, on ne parle plus guère aujourd’hui d’éducateur dans les écoles sinon peut-être encore pour les surveillants. En effet, on parle de professeurs, d’instituteurs, de maîtres d’école, de licenciés, de régents mais le terme «éducateur » n’est plus guère usité. J’espère qu’il ne présage pas de l’abandon de la fonction éducative dans le cadre scolaire. Le terme d’éducateur professionnel s’intègre davantage aujourd’hui dans le monde de l’aide à la jeunesse et de l’aide à la personne handicapée. Mon propos ici n’est pas de dire qu’on éduque plus ou mieux dans tel ou tel secteur mais bien qu’on éduque autant et nous invoquons sans complexe la protection de St Jean-Baptiste en tant que patron des éducateurs chrétiens.

Dans ce monde de productivité, de mondialisation de l’économie, de rapidité et de rentabilité, dans cet univers impitoyable où chacun doit être riche, beau, intelligent et efficace, la personne handicapée fait figure de nouvelle pauvreté. Le dénuement intellectuel qui entraîne souvent la pauvreté financière, mais aussi sociale et affective, place le simple d’esprit dans la marginalité de notre société. Oh ! Combien a-t-il besoin aujourd’hui d’être stimulé, encadré, aimé pour pouvoir grandir et devenir dans sa différence un être à part entière.

Qu’il est beau notre métier d’éducateur, quand nous voyons, ces personnes, rejetées de beaucoup, et parfois même de l’école, qui grâce à des tonnes de patience, de travail et d’amour évoluent vers plus d’humanité, quand celui-là qui ne savait pas exprimer un sentiment s’ouvre à la dimension affective et nous dit qu’il est heureux d’être avec nous ou quand cet autre qui ne pouvait pas parler, commence à babiller, rit et illumine nos vies de sa simplicité et de sa joie. Quand je vois ces Hommes qui s’ouvrent à l’humanité, comme des fleurs au printemps qui n’attendaient qu’un premier soleil, je me sens proche de St Jean-Baptiste qui voyait ses petits écoliers pauvres et perdus pour beaucoup, s’ouvrir à la connaissance et à la dignité. Je crois que je peux dire, alors, que je suis dans la joie du Christ.

Au quotidien, les difficultés pour réaliser la mission lasallienne dans son sens chrétien sont bien réelles. Je ne vais pas m’appesanti, en ce jour, sur les difficultés de subsidiation que connaît le secteur, qui ne se distingue pas en cela, malheureusement, de l’ensemble du secteur non-marchand subsidié. Les conditions de travail sont parfois pénibles et la reconnaissance de nos réalisations est souvent absente. Le véritable danger qui risque d’endiguer notre mission lasallienne est le large mouvement de déchristianisation de notre société. Nous trouvons de plus en plus difficilement du personnel qui veut s’investir dans une dimension chrétienne de l’institution. Nous avons récemment engagé un psychologue, sur les sept que nous avons rencontré en entretien, tous se sont déclarés agnostiques ou athées, bien que plusieurs sortaient de l’enseignement catholique. Le sens chrétien est remplacé par un humanisme mou à relents d’évidences sociales. La foi devient affaire personnelle et malheur à celui qui veut en parler, il sera taxé d’intolérance, sera sujet à raillerie ou devra justifier les péchés de l’Eglise. Si la propagation du message chrétien ou même la justification religieuse de son action, sont devenues un nouveau tabou social, témoigner de la dimension prophétique de ses œuvres sociales devient problématique.

Je voudrais maintenant vous raconter deux histoires:

Chaque année pour la fête de notre saint patron Mutien-Marie, une section animée par une chef éducatrice engagée dans sa foi organisait une messe et une journée festive. Sous mon impulsion, lors d’une de nos réunions de responsables, elle a émis la proposition que tout le centre, ses 85 personnes handicapées et sa quarantaine d’encadrants, participent à la fête. Après un moment d’étonnement, tous, plus tentés sans doute, par la fête que par la célébration ont accepté.

Avec la complicité du Frère EUL, nous avons organisé une matinée à Malonne avec visite du petit musée et messe en matinée et une après-midi festive à Namur. Notre administrateur et aumônier Monsieur le doyen Jules WARZEE anima la messe en exploitant au mieux la fraîcheur et de spontanéité typique de notre public. Certains pèlerins qui s’étaient retrouvés là un peu par hasard sont venus remercier le célébrant, en lui affirmant qu’ils n’avaient plus vécu une messe d’une telle intensité et d’une telle spiritualité depuis longtemps.

En souvenir de cette fête, j’ai acheté des médailles de Saint Mutien-Marie. Je les ai distribuées aux personnes handicapées qui les ont acceptées avec la joie que l’on devine, mais aussi au personnel. Parmi celui-ci, certains membres ont ricané ou l’ont refusée. Je pensais que l’histoire de la médaille en resterait là. Le lendemain la plupart des personnes handicapées l’arborait fièrement mais quelle ne fut pas ma surprise de voir plusieurs membres du personnel qui s’en ornaient et la portaient comme un étendard. Comme mon regard se teintait d’étonnement mais aussi de joie, je voyais poindre dans leurs yeux une lueur de fierté, de liberté et d’allégresse, cette même lueur qui devait sans doute briller dans les yeux des premiers chrétiens quand ils se reconnaissaient entre eux.

Depuis lors, chaque année, vers la fin janvier, nous organisons cette fête qui est devenue un véritable lieu de retrouvailles et de joie où chacun se rencontre en toute simplicité et pour un partage fraternel. Hier, par exemple, nous étions plus de 150 personnes réunies autour de l’eucharistie et pour l’après-midi récréative qui s’en suit : personnes handicapées, personnel, membres du Conseil d’Administration. Lors d’une de ces fêtes, Monsieur le Doyen de Philippeville m’avait fait cette réflexion à laquelle je pense souvent : « Il est rare de voir autant de personnes heureuses en même temps ! »

En relisant un texte de foi et lumière, soudain, j’ai compris le sens de ce qui me semblait plutôt une déclaration de principe : « Nous avons la conviction que les personnes ayant un handicap mental ont été choisies par Dieu pour susciter beaucoup d’amour et de joie parmi nous. A nous d’être inventifs pour que les personnes handicapées puissent exercer leurs dons et que nos communautés puissent expérimenter ce que dit saint Paul : «  Les membres les plus faibles sont nécessaires au corps tout entier ». Nous devons dire et redire au monde d’aujourd’hui la valeur de chaque personne, quels que soient ses handicaps, ses fragilités, ses faiblesses. La transformation des cœurs à laquelle les personnes ayant un handicap mental nous conduisent nous montre la force de sa fragilité. J’ai la conviction que ces personnes ont un don à offrir à notre monde, et non des moindres : celui de le rendre plus humain.

Il me semble qu’aujourd’hui, nous avons un peu trop tendance à reconnaître la présence du Christ uniquement dans l’amour et la joie et non plus dans le signe . C’est pourquoi, je voudrais vous raconter cette deuxième histoire particulièrement significative mais j’aurais pu vous en raconter des dizaines du même ordre.

Comme je l’ai expliqué plus haut, les parents souhaitaient un « Centre de Nuit » pour leur enfant. Quand le besoin s’est fait vraiment pressant, nous étions un peu désespérés car nous n’avions que peu d’argent et le problème nous semblait insurmontable. Finalement, de façon providentielle, nous avions l’occasion d’acquérir un hôtel au dixième de son prix situé idéalement aux milieu de tous nos centres d’accueil de jour. Nous avons tenu à le visité avant l’achat  … Que de travail en perspective : le bâtiment avait été abandonné depuis 94. Il avait été squatté, on avait volé les radiateurs et la chaudière ; les boîtiers électriques avaient été arrachés ; les portes cassées et de nombreux carreaux avaient volé en éclats, les sols et les murs étaient barbouillés d’immondices. Des tuiles s’étaient envolées du toit et la pluie pénétrait dans le bâtiment depuis 6 ans, défonçant les plafonds, pourrissant les plinthes. Toutes les tuyauteries avaient éclaté avec le gel… Et pourtant, lors de notre première visite à « LA CHEVALERIE », après avoir constaté la désolation du bâtiment, nous avons découvert les chambres qui étaient généralement dans un état déplorable. Et puis, nous sommes arrivés dans une chambre du fond qui n’était pas dans un meilleur état que les autres mais notre regard a de suite été attiré par un tableau au mur qui semblait inaltéré, le dessin en était intact comme rayonnant, resplendissant. Il s’agissait d’une reproduction d’une peinture de Benjamin Wautier exposé à l’Albert Muséum de Bedford. Elle représente une scène où l’on voit saint Jean-Baptiste de la Salle ou un frère des écoles chrétiennes, qui encadre une sortie de classe. Des enfants rougeauds s’ébattent joyeusement dans la neige, un matin d’hiver du 17°s. Ces enfants pauvres qui dans ce siècle étaient rejetés et abandonnés de tous ont retrouvé leur dignité et leur joie grâce à l’attention, la compétence et à l’amour de leur éducateur.

Au vu de ce tableau, qui brillait comme un phare dans la nuit et que nous conservons précieusement, nous ne pouvions hésiter, il ne nous restait qu’à relever les manches, à travailler pour transformer cette triste masure en magnifique hôtel qu’il était encore il y a une dizaine d’années; ce que nous fîmes avec zèle. La veille de l’inauguration, une personne handicapée vint apporter un cadre acheté au Sanctuaire avec le portrait du Frère Mutien-Marie et l’inscription : « Bénissez cette maison ! ». Nous savons que Saint Jean-Baptiste et Saint Mutien-Marie sont là, qu’il nous montre le chemin, qu’il nous aide dans notre quotidienneté à construire le royaume de Dieu sur terre. Je ne peux m’empêcher de penser à la parole du Christ : «N’ayez pas peur car Je marche au milieu de vous ».

Ne commettons pas l’erreur des disciples d’Emmaüs qui s’écrièrent trop tard : « C’était Lui qui marchait avec nous et nous ne l’avons pas reconnu ».

Michel GENGOUX