Le Pouly – Discours de notre directeur à l’occasion des 20 ans du Pouly

Je vous remercie de vous être joints à nous pour inaugurer les festivités des 20 ans du Pouly comme centre de jour pour adultes.

Cet anniversaire est particulièrement émouvant pour moi car c’est la première fois que je fête un évènement institutionnel de 20 ans que j’ai personnellement vécu et initié. Effectivement 2008 a été l’année de mes 20 ans de maison, unhealthy et donc je suis, nurse pour la première fois, le témoin direct de la création ou du moins de la transformation du Pouly.

En effet, le Pouly est le seul centre de l’ASBL qui peut prétendre avoir été «jeunes» avant d’avoir été «adultes». Quel privilège! Pour comprendre ce mauvais jeu de mots, il faut se plonger dans le passé du Centre Mutien-Marie.

En 1978, les Frères des Écoles Chrétiennes fondèrent le Centre Mutien- Marie qui se composait d’un Institut Médico-Pédagogique et d’une École secondaire Spéciale pour enfants en situation de handicap à Philippeville.
Très rapidement, les responsables prennent conscience que certains adolescents n’ont pas les capacités requises pour suivre un enseignement spécialisé. Ils décident en 1982 de créer un groupe occupationnel pour enfants non scolarisés.

Cette année-là, ce groupe composé de cinq jeunes et de deux éducateurs s’installe à Nismes et démarre un petit élevage de poulets. Le petit groupe tire son nom de cette activité. Le Pouly sort de l’œuf et voit donc le jour en 1982. Géographiquement éloigné de son centre névralgique situé à Philippeville, Le Pouly déménage en 1984 dans le petit village de Jamagne lequel compte sur ses terres de nombreux agriculteurs. Désireux de s’intégrer à la vie rurale, Le Pouly continue de développer son élevage de volailles. Cette activité liée à la terre facilite les échanges avec les villageois et constitue sans nul doute les prémisses des futures activités intergénérationnelles.

Quand je suis arrivé en 1988, la section, qui avait élu domicile dans une petite fermette du bas du village, accueillait 8 ou 9 enfants non scolarisables ou du moins non scolarisés. Cette section faisait partie intégrale du service d’accueil de jour pour mineurs du Centre Mutien-Marie.
En 1986, voyant que sa population vieillissait et que rien n’était organisé dans la région pour les personnes handicapées adultes, le Centre Mutien-Marie crée un premier centre de jour à Yves-Gomezée «La Roseraie» en vue d’accueillir une quinzaine de résidents. Vu le succès, un autre fut créé en 1987 dans le village de Anthée: «Le Tournevent» qui pouvait accueillir 15 personnes.

Nous avions compris que notre destin pédagogique était de se transformer entièrement en structure pour adultes, vu la pression de la demande et l’autonomie des pédagogies. L’ancien directeur avait déjà planifié la transformation et prévoyait 3 centres de jour de 20 places pour adultes. L’emplacement du 3e°centre était à étudier mais la disparition du Pouly était programmée.
Le dynamisme pédagogique et le potentiel d’insertion développé déjà à l’époque par Claude GILLES et son équipe m’avait séduit et je trouvais dommage de sacrifier un si bel outil. Un évènement extérieur et apparemment anodin allait précipiter la décision.
En 1988 la majorité est passée de 21 ans à 18, et la plupart des mineurs que nous suivions depuis des années avaient atteint ou allaient atteindre l’âge de 18 ans. Par la magie du législateur, nos résidents sont devenus du jour au lendemain adultes.

Il était donc logique de demander simplement la transformation de notre structure de jour pour mineurs en service pour adultes et nous avons pu ainsi continuer à accompagner des personnes que nous connaissions bien.
Le Tournevent avait à l’époque une liste d’attente importante et le responsable Monsieur Gailly faisait pression pour obtenir une augmentation de son propre agrément. D’un autre côté, le Pouly s’ouvrait à quelques kilomètres de La Roseraie et il n’était pas évident dès lors de remplir rapidement notre Pouly de personnes adultes.

J’ai donc téléphoné à la Communauté française, pouvoir subsidiant à l’époque, qui m’a conseillé d’ouvrir un petit centre de 12 places au Pouly et d’agrandir le Tournevent vu sa liste d’attente …
J’entends encore le fonctionnaire me dire: «Si ça marche bien vous pourrez toujours demander une augmentation de capacité». Le moratoire est tombé et nous avons dû attendre 1997, soit 8 ans après pour pouvoir augmenter notre capacité d’accueil, suite à la reprise par le Centre Mutien-Marie d’une institution en faillite. Nous pouvions passer à 20 places agréées et enfin avoir une gestion équilibrée et nous équiper en personnel psychologique et paramédical bien nécessaire.
Pendant ce temps, nos installations se déplaçaient en 1996 pour venir ici et s’agrandissait en 2005 pour offrir un environnement le plus adapté possible pour notre pédagogie.
Les performances pédagogiques du Pouly ne cessent de s’accroître.

Le souci d’intégration de la personne handicapée dans le village devient et reste la motivation de fond du travail du Pouly et particulièrement dans le cadre intergénérationnel. Chaque année à Noël, notre section organise une fête où les personnes les plus âgées du village sont invitées à partager un repas fraternel.
L’objectif est de recréer des liens sociaux en particulier entre les personnes âgées et les personnes en situation de handicapé. Le Pouly continue évidemment le service au village au travers de la petite épicerie. Il a créé une espace vert de détente ouvert au village et est l’organisatrice de la grande fête du village: la fête des fleurs. Celle-ci est véritablement devenue un événement attendu et, chaque année, elle draine tout le village de Jamagne dans le cadre d’une réjouissance où chacun, personne handicapée ou non vient s’amuser.

Le Pouly collectionne véritablement les prix et les récompenses: la Fondation Roi Baudouin, Proximus, C&A, tout dernièrement encore «Le SOIR» et je ne cite que les principaux. Il faut dire qu’il ne ménage pas ses efforts et son originalité. Que de souvenirs: la naissance de l’épicerie, la culture du tabac, la grande entreprise des fraises, la liqueur de cassis, le voyage au Canada, tout le travail intergénérationnel, la collaboration avec l’école, j’en passe et des meilleurs …

Aujourd’hui le Pouly est confronté à de nouveaux défis et plus particulièrement le vieillissement de sa population. Mais je suis persuadé que nous trouverons les réponses les plus adéquates comme nous l’avons toujours fait.
Cette formidable aventure du Pouly n’a pu se réaliser que grâce à la compétence et au dévouement de chacun de ses administrateurs, de ses travailleurs et de ses bénévoles; je voudrais tout particulièrement les remercier et les féliciter.
Mais le Pouly c’est aussi et surtout tous ses résidents qui nous apportent tous les jours leur fraîcheur, leurs sourires, leur bonhomie, leur extraordinaire gentillesse et leur amour sans limite. Je voudrais remercier également leur famille qui nous font confiance et qui sont nos partenaires privilégiés dans l’accompagnement et la pédagogie que nous mettons en place.

Enfin je ne voudrais pas terminer ce petit speech sans une pensée chaleureusement pour Arlette Mot, une résidente, qui nous a quittés la semaine dernière. Arlette était une personne chaleureuse, douce et agréable avant que la maladie ne la foudroie. Par sa présence gentille, elle nous rappelait la chance que nous avons de travailler avec ceux que l’on appelle les plus faibles et qui pourtant nous apportent tant et donne sens à notre travail voire à notre vie. Arlette nous manquera mais je sais qu’elle sera toujours parmi nous ne fût ce que par son souvenir. Mais passons maintenant à la fête …